Saturday, August 16, 2025
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Eric Fiat: How to distinguish bad fatigue from good fatigue?

L’édito de Charles Pepin :

J’aimerais vous raconter l’histoire d’un homme un peu crevé, un peu à plat. Et aussi un peu énervé de l’être. Il aurait voulu la grande santé, l’énergie maximale et le cœur à l’ouvrage. Il aurait voulu l’énergie conquérante et l’envie de tout bouffer. Mais voilà, il est un peu crevé. Il a du mal à s’y mettre. Il ne sait pas par quoi commencer, alors il ne commence pas.

Il regarde par la fenêtre et quelque chose le surprend dans le ciel, la forme des nuages, comme de petits personnages. Et un éclat bizarre, un éclat bizarre dans le coton du ciel. C’est comme si la fatigue le rendait soudainement plus disponible à la contemplation. Comme s’il fallait qu’il arrête de courir pour ouvrir un peu les yeux. Dans le couloir il croise un collègue qu’il n’aime pas trop et il lui semble que sa hâte, pour ne pas dire son zèle, ne sont que vanité, ne sont que servilité. Il sourit en songeant que tout vient de la poussière, et y retournera. Ce collègue, il l’imagine maintenant en poule. Cette manière de hâter le pas dans le couloir avec un air d’importance… Il voit maintenant une poule fuyant à l’approche d’une voiture. Il réprime un fou rire, puis s’y abandonne tout à fait. Ce doit être la fatigue, ce doit être ça. Calme de nouveau, il songe à Just a perfect day de Lou Reed : cette chanson est un chef d’œuvre. Lou Reed aurait-il pu l’écrire s’il n’avait pas été fatigué ?

La fatigue parfois nous ouvre les yeux, nous rappelle à un peu de distance et à un peu d’humilité. Bien sûr, sa fatigue n’est pas celle de l’ouvrier épuisé par une tâche répétitive dans un hurlement de métal. Mais sa fatigue n’est pas non celle de l’artiste heureux de l’œuvre achevée ou des amants épuisés par une nuit de plaisirs. Non, elle est entre les deux. Une fatigue ni scandaleuse ni merveilleuse, ni aliénante ni délicieuse. Une fatigue juste humaine, mais qui induit quand même qu’on voit le monde autrement, et peut-être qu’on se sent plus humains que jamais.

Pour en parler ce matin, j’ai la joie de recevoir un philosophe fatigué. Peut-être parce qu’il est à la fois professeur à l’université Gustave Effeil de Paris Est, directeur du Masters d’éthique médicale et musicien, violoncelliste dans l’ensemble instrumental de Château Thierry. Peut-être aussi parce qu’il écrit des livres exigeants et délicats comme La Pudeur, Le Petit traité de dignité ou, justement, L’Ode à la fatigue. Peut-être enfin parce que la fatigue est pour lui, sous certaines conditions, l’autre face d’une vulnérabilité sans laquelle nous n’aurions nulle beauté. Eric Fiat est avec nous sous le soleil de Platon et c’est une bonne nouvelle. Avec lui, nous allons nous demander ce qui distingue une mauvaise fatigue d’une bonne fatigue.

Programmation musicale :

  • LEONARD COHEN – Suzanne – 1968
  • JUNIORE – Amour fou – 2024

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A Miami marine reporter, Delaney maps coral-reef heartbreaks with watercolor sketches and policy sidebars.
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